"Tu sais, Ro, il ne m'a jamais fait l'amour de fa�on d�lib�r�e. Il ne m'a m�me jamais embrass�e."
"...Pourtant �a n'avait pas l'air d'un enfoir�."

La premi�re fois que j'ai regard� dans ses yeux, j'avais vu quelque chose d'infiniment doux et lumineux, et je suppose que j'ai eu le coup de foudre. Vous pouvez v�rifier dans ce journal, c'est il y a presque exactement un an d'aujourd'hui, une semaine de moins peut-�tre.

Et j'avais raison. Il est tr�s d�licat, dans un lit. Juste compl�tement insensible, mais pas brutal du tout, attentionn� et habile. Simplement, ce manque de tendresse, cette animalit� compl�te de la chose, a achev� de rendre la jeune fille amoureuse et dissimulant sa passion en compagne r�sign�e, paralytique, terrifi�e par le rejet, incapable d'exprimer sa volont�e. Une fa�on de coucher par amertume, finalement. Pas �tonnant que �a me prennait tout un jour pour me remettre.

Et on avait mis tout �a au clair il y a un mois, ou moins. On ne s'�tait pas revu depuis, il �tait parti en Angleterre, je ne r�pondait pas m�me � ses courriels, j'�tais f�ch�e et je reprennais possession de moi-m�me, par rapport � lui. Et puis, lundi dernier, il est venu, avec un de ses amis que j'adore, venu souper � la maison de mes parents. Je crois que je me suis gu�rie de ma terreure, parce que j'arr�tais pas de le narguer, de lui toucher les cheveux, et autres. Mais je ne me suis pas gu�rie de mon d�sir, parce que je deviens toute chose quand je regarde le creux � la fin de sa m�choire et au d�but de son cou, ou quand il passe son piercing de langue sur sa l�vre du bas.

�videment, que j'en ai encore envie. � ma mani�re, cette fois.

Hier soir, j'ai �crit une lettre de deux petites pages, bien concises et bien claires, qui me permet �galement de reprendre possession de moi-m�me, par rapport � une autre personne. Si possible, je vais la poster aujourd'hui. Et avec le d�part des deux pages (recto seulement), une grande lessive dans ma petite t�te, un holocauste s�lectif, une s�gr�gation fatidique. �a a d�j� commenc�. Je suis tr�s confortable l�-dedans. Je n'attends pas de r�ponse, et comme ne rien recevoir serait le plus douloureux si j'attendais, tout est bien.

Aujourd'hui, je vais voir ce ga�rcon que j'ai rencontr� � la Brasserie Cherrier, ami d'un de mes amis. On se pla�t, mais je n'en attends rien, sauf une vague envie de copinage.

Pass�e � un autre �tat.

-L