Insomnie.
Mon corps est �puis�, mais ma t�te est l�, incapable de fermer l'oeil, de se rendre avec confiance aux instances du sommeil; ma t�te est une mauvaise amante.
Je suis aux abois.
Je suis angoiss�e.
Quelque chose ne va pas du tout, j'ai beau palper, il est bien dur d'�tablir un diagnostic.

Alors quelle partie de votre n�vrose vous fait souffrir aujourd'hui madame, c'est les complexes? L'estime de soi? Oh je vois; vous avez encore perdu le fil de votre existence.

bon.
Alors, je vois bien que ce qui me rend malheureuse c'est le manque de direction. Il faudrait que je sente une certaine avanc�e dans les jours, pas seulement le gai mais vide �grennement de ma jeunesse. Je n'ose pas dire que j'ai perdu la passion. Je n'ose pas dire que je n'ai rien � vous dire, dans le fond.

C'est que je me suis toujours sentie � l'�cart, dans quelque situation que ce soit. Je ne me suis jamais sentie de pair avec les autres. Toujours, j'ai eu l'impression que mes paroles �taient inutiles, que mes opinions mordaient aussi fort qu'un hamster aux dents lim�es, que mes id�es tombaient dans l'oreille des sourds pour �tre r�p�t�e ensuite triomphalement et entendue, que mes insultes �taient risibles, sans effets, aussi inutile que le coup de patte d'un chat d�griff�.
Peut-�tre est-ce pourquoi j'ai autant raffin� ma r�thorique; vous en jugez de la plus ou moins grande qualit� selon le plus ou moins grand talent que j'ai.
De l�, sans doute, ce nombrilisme accaparant qui m'a pouss� � creuser les moindres recoins sale de cette conscience toujours en auto-examination, � inspecter ma petite histoire pour y d�celer les indices de mon identit�e floue. De l� aussi cette non implication flagrante dans le monde qui m'entoure.
Aucun parti politique, pas de journaux ou de magazines pr�f�r�s, pas d'estaminets de pr�dilection, pas de style solide en dessin ni en �crivaillerie, pas de ligne de conduite, pas de mot d'ordre, pas d'idoles, pas d'activit�s, pas de projet, pas de routines, pas de groupe, de groupuscule, de gangs, d'appartenance.
La libert�, dans sa forme stagnante;
Mon monde est vide de collectivit�.
Je vis en parasite dans la soci�t�, encore � t�ter la subsistance parentale.
[...]
Lendemain matin; �tait-ce un manque de prot�ines? Apr�s avoir englouti de succulentes fl�tes de poisson p�n�es dans du gras croustillant, un oeuf dur, du lait de soya et ce matin deux 'breakfeast veggie patty" ainsi que deux tranches de pains enduites dMune �paisse couche de beurre d'arachide, je me sens un peu plus, et birn, "l�".
Je vais porter des CV.
Je suis angoiss�e.
(cringe)
-L