Je suis en classe. Je m'attrappe pensivement un bourrelet en me r�p�tant la m�me chose que d'habitude: je devrais faire dus port je ne fais pas de sport faut commencer � faire du sport le sport �a fait du bien le SPORT.
�videment je n'en fait pas.

Aujourd'hui, alors que je lui parlait, il ne se doutait pas que je lui disait adieu, � lui et � tous les autres. Ils travaillent gentiment, s'adressaient � moi, qu'ils commen�aient � conna�tre, � force de me voir � toutes les semaines et moi j'essayaient de m'impr�gner des senteurs et des d�tails familiers, pour ne pas trop les oublier quand je serai loin. Je ne reviendrai probablement plus.
Il me tendit mon sandwich � l'aubergine et je sortir de l'�picerie libanaise main Import. Pas de sac hein mademoiselle? Non pas de sac. C'est la derni�re fois que vous avez � vous en souvenir.

Je d�m�nage dimanche. Il se peut que vous me voyez tous moins souvent pendant une semaine; je n'ai pas encore souscrit � un abonnement internet, et je serai assez occup�e.
J'appr�hende quelque peu ce sevrage. Je me suis accoutum�e � �tre branch�e au r�seau en permanence; quand je ne le suis pas, j'ai une sensation de coupure, de solitude et d'�loignement assez paniquant.
...Y'a des gens qui magasine presque tous les jours de la semaine, alors vous m'�pargnerez vos insultes m�prisantes sur ce que cela a de path�tique et de risible.

Tout � l'heure, dans la salle de bain du neuvi�me �tage, l'�tage du d�partement d'animation 2D et 3D, j'ai regard� dans le miroir le reflet d'une fille amoureuse. J'ai tent� de voir ce qu'il y avait de diff�rent, mais peine perdue: les cheveux un peu plus gonfl�s, les cernes plus creus�s, les l�vres un peu s�ches, le teint un peu plus roses. Je la trouvais peut-�tre un peu plus jolie que d'habitude, cette fille; son visage m'apparaissait comme un tout coh�rent, plut�t que comme une s�rie de d�tails discordants, sans harmonie, changeants et incontr�lables.

Je dois m'�tre lev�e en somnanbule au milieu de la nuit il y a deux semaines, afin de me donner un bon coup de pelle sur le cr�ne, puis m'�tre recouch�e, sonn�e et mes bonnes r�solutions � l'eau.
Je m'�tais promis le coeur sec, la t�te froide, le sexe chaste et tranquille d'une soeur. Je m'�tais dit que je p�serais les options, prendrais mon temps, consid�rerais longuement toutes les cons�quences, les avantages, inconv�nients, mesures � prendre, si c'�tait � refaire. Je promettais une conqu�te gagn�e de haute lutte seulement � qui se pr�senterais. Je voulais �tre en glace polaire, r�serv�e, appara�tre sacr�e comme une haute et lointaine ville sainte.
Et bien non. Je m'enflame encore comme du vieux bois sec, je m'empli du suc de sa douceur comme une �ponge marine trop longtemps �chou�e sur a gr�ve, j'ai rien appris et je grince car je sais que la chute qu'on me promet sera faite d'une immense hauteur.
J'essaie de me dire que cette-fois-ci-c'est-diff�rent... J'ai l'impression de retourner � mes treize ans et d'y croire, un peu comme on croit � son prince elfique apr�s avoir lu le Seigneur des Anneaux � la pr�adolescence. J'ai l'impression de pas me tromper. J'ai l'impression que �a go�te autre chose. On dirait presque que je n'ai pas � enjoliver cette fois-ci, � faire des arragenemnts mentaux boiteux, � croire � des non dits qui seraient effectivement tus de par leur inexistence.
Mais j'ai re�u tellement de claques en continu pendant tellement longtemps, je ne sais plus trop quoi me dire.
J'ai envie de me laisser bercer et de croire que je suis au bout de mes peines, que je m'appr�te � briser la surface de mes liquides chagrins dans un �norme fracas de mousse et d'�cume de f�licit�, mon amour comme une �norme baleine bleu qui jaillit puissament des eaux et s'y laisse amerir victorieusement, flottante...
Mais j'ai comme un poid, un poid de fatalit� � la cheville, la cha�ne en est longue mais j'ai bien peur qu'elle se tende juste avant la premi�re goul�e d'air: et cette fois-ci, je me noierai.

-L